Nouvel agenda et nouvelle carte d'étudiant, ma dernière.

J'ai bizarrement collé une étiquette de vin sur cette première page, je pense qu'il s'agit du Gewurtzraminer que j'ai bu pour fêter ma soutenance de thèse à Strasbourg.

Lundi 7 septembre, Dominique a des contractions et écourte le repas chez Pierre et Christine (et Noé fait ses premiers pas?). Fausse alerte, c'est seulement vendredi 11 que Madeleine est née.

Je fais ma rentrée dans deux collèges de Drancy et Livry-Gargan. Fuck, j'ai encore cours le samedi matin.

Samedi 27 septembre, Sophie Calle expose tous ses cadeaux d'anniversaire (je pense que c'était au CNP, rue Berryer).

Lundi 28 septembre. Nous avions de problème financier avec Jeune Peinture (moins de soutien ministériel, frais de location d'espace en hausse) et on (Fromanger?) nous avait conseillé de nous rendre à la commission culture du PS. Je mets pour la première et dernière fois les pieds rue de Solferino, où sont rassemblées des personnes grises et chiantes (croquis). Quelqu'un prend la parole et je le trouve assez brillant une fois passées les 10 minutes de langue de bois. C'est Bertrand Delanoé, qui deviendra plus tard le maire de Paris.

Tien, j'ai vu ce spectacle de Christophe Haleb ! J'ai rencontré Christophe à diverses occasions depuis mais je n'avais aucun souvenir d'avoir vu ce spectacle. C'était au Studio de la danse contemporaine, dans le marais, une petite salle où nous allions voir des trucs très divers, souvent parce que Yann C nous proposait des places. Je ne sais pas quel était le statut de cette salle, j'ai l'impression que c'était en lien avec le futur CND mais je ne trouve rien à ce propos.

Lundi 1er mars, Emma a le permis de conduire.

Jeudi 4, superbe spectacle de Meg Stuart en collaboration avec Ann Hamilton, Appetite. Je me souviens de longues pièces de tissus créant des sortes de prothèses sous les vêtements, placés ou retirés du corps des danseuses ou danseurs.

Le lendemain nous partons pour New-York. J’ai encore la sensation du sourire que j’ai eu en sortant du métro et découvrant émerveillé les building de la 6e avenue dans un froid sec et ensoleillé. Je viens pour la première fois aux Etats-Unis, je mange pour la première fois du homard dans un speak easy dégotté par Hervé qui vit ici.

Dimanche 7 mars, je dessine les tours jumelles du World Trade Center et j’écris juste à côté : Stanley Kubrick est mort. Tiens-tiens, comme par hasard…

Je me souviens que pour ces 4 jours à New-York, nous avions décidé de ne visiter aucun musée. Pour nous obliger à revenir.

Samedi 13 mars, nous allons voir le spectacle de danse de Chloé et Camille au théâtre de Macon. Je crois me souvenir d’une chorégraphie sur Britney Spears. Petit croquis de la maison.

Lundi 15, je suis peu sensible au coucher du soleil sur champs de blé battus par le vent / regard vide de Richard Gere fixant le lointain, dans Les moissons du ciel de Terence Malik. Déçu. Je n’ai aucun souvenir du film vu le lendemain.

Mercredi 17 mars, Serge revient finalement dans le comité Jeune Peinture.

Dimanche 21, la semaine se termine par un concert salsa aux Métallos, une pho chez Dong Huong (et pas Dong Wong) et une bière au Cannibale (au singulier). La vie de quartier.

Lundi 20. Décrochage de l’expo Jeune Création dans l’Espace Eiffel-Branly, il y a eu des vols dans la nuit.

Plongée dans les champs de couleur de Rothko mardi 21 avril, qui se poursuit le lendemain avec les vues du Grand Canyon par David Hockney (et pas Hocqney, pfff) et les tablâ de Zakir Hussain (pas Hussein, pfff) pour clore le voyage. Dépaysant.

Après le concert, nous mangeons au Bistrot des Oies, pour l’anniversaire de Sarah ; elle avait donc déjà rencontré Stéphane, même si son nom n’apparaît pas encore sur l’agenda.

Le lendemain, nous partons à Noirmoutier, où Ben vit toujours avec Shy, le pittbull mangeur de porte déjà mentionné il y a quelques semaines, qui est toujours aussi pénible (il pisse sur la porte, lundi 26).

Je dessine la « petite maison » où squatte Stéphane, un copain de Ben (rien à voir avec le Stéphane de Sarah, même si Sarah et Lola nous rejoignent le dimanche).

Nous empruntons la Diane-camionnette des grands parents !

De retour à Paris, lundi 26 avril, nous allons voir Masurca Fogo de Pina Bausch. Grande claque ! La pièce est inspirée par Lisbonne, je me souviens de la séquence que j’ai dessinée : sur scène, une grande bâche en plastique transparent est pliée et tenue verticalement tandis que les danseur.eus.es y versent des sceaux d’eau afin de constituer une sorte de piscine-couloir, dans laquelle ils et elles se jetteront pour des traversées jubilatoires en maillot de bain.

Je devais être en manque de cinéma cette semaine-là (c’est vrai que le rythme des séances s’était calmé depuis quelques mois) : 5 films dont le fascinant Un temps pour vivre, un temps pour mourir de Hou Hsiao Hsien. Pas de souvenir du Kaurismaki.

Dans le semaine du 3 au 7 mai, je m’étais inscrit dans un stage « représentation à vue » proposé aux enseignant.e.s du secondaire dans le cadre des formations pédagogiques. Une semaine de croquis en bords du canal de l’Ourcq. Le prof organisateur du stage apporte une raie congelée, fixée sur un arbre pour être dessinée pendant qu’elle goute sous les rayons du soleil. Dimanche, retour à Noirmoutier, je fais un petit croquis de la pinède pour ne pas perdre la main.

Mardi 11, j’accompagne une classe du collège de Livry-Gargan au Futuroscope de Poitier (départ 4h30, pas humain !). Nuit sur place avec spectacle de danse rock au restaurant « Roller » si j’en crois mon dessin. Les élèves trouvent globalement que c’est bien moins bien que Disneyland. Je suis traumatisé par la projection en « omnimax » (avec sièges qui bougent) dans le Pavillon de la Vienne, qui commence par une mosaïque monumentale composée de portraits de René Monory (fondateur du Futuroscope et président du Sénat). AAAAAH ! Je me souviens aussi d’une élève qui s’est fait draguée par deux jeunes Allemands dans la file d’attente d’une attraction. Elle finit par rouler une longue pelle à l’un deux, devant la stupeur de ses ami.e.s qui lui disent que quand même, après seulement 5 minutes de discussion, c’est un peu rapide. Elle a répondu : il est très beau.

Lundi 17 mai, naissance de Ninon, la Kanaky entre un peu plus dans la descendance familiale.

Le soir Franck V nous avait aiguillé vers un concert mémorable à l’Hôtel du Nord, réunissant l’écossais Jackie Leven (mort en 2011) et le génial David Thomas (de Pere Ubu). Nous étions resté.e.s boire des coups à la fin à quelques tables des deux musiciens pas peu assoiffés.

Jeudi 27, je fais mon premier entretien pour un poste de Maître de conférence à Amiens. Pourquoi je me suis dessiné en train de lire au soleil ??

Samedi 29, nous allons voir la diffusion de télé Bocal à Goumène bis. Tellement 20e siècle.

Lundi 31, j’apprends que je ne suis pas auditionné à Strasbourg alors qu’on m’avait plus ou moins fait comprendre qu’on espérait ma candidature. Fuck Strasbourg 

Mardi 8, guillaume se pendouille rue de la Roquette avec sa Compagnie Les Passagers.

Mercredi 9, j’offre une table basse indienne à Emma… qui est toujours dans notre salon. Le soir, Damien renverse le plat de lapin si j’en crois mon croquis. Aucun souvenir.

Vendredi 11 juin 99, déjà une confrontation avec l’armée russe, qui entre au Kosovo et occupe l’aéroport de Pristina sans autorisation, oùl’OTAN devait prendre place suite aux accords de paix approuvés par le Conseil de sécurité des Nations Unis le 10 juin.

Habituellement, l’AG de Jeune Peinture se tenait le dernier week-end du salon pour profiter de la présence du plus grand nombre mais le moment est compliqué : Katerine part après une année tendue qui vit plusieurs membres quitter le navire et nous manquons de candidatures. Nous nous réunissons donc seulement le 11 juin, dans l’amphi des Beaux-Arts (celui des AG d’Act Up), le temps de convaincre quelques artistes de s’engager dans l’association et nous terminons par une élection du nouveau comité : seulement 6 personnes (pour 12 habituellement). J’accepte la présidence non sans inquiétude.

Le lendemain, j’apprends que je suis classé second pour le poste de Maître de conférence à Amiens mais comme le candidat reçu (Miguel E) était PRAG (détaché du secondaire) dans cette même fac, on me propose son poste. Je vais donc quitter le collège l’année prochaine pour mettre un pied dans l’Université. Pour fêter la nouvelle, j’achète des CD : Pavement et Fatboy Slim. Pas mal.

Jeudi 28 janvier, je participe à une exposition collective dans la galerie Area, du drôle de bonhomme Alin Avila (qui a créé la revue Area par la suite). Je ne me souviens plus du nom de la commissaire.

Dimanche 31, froide journée de ski en famille aux 7 Laux (-20°), mes cousines Rachel et Sylvaine se font piquer leurs skis devant le bar du bas des pistes. J’y pense chaque fois que je pose mes skis pour aller prendre un verre en station.

Nous buvons souvent du champagne dans cette semaine post-soutenance de thèse (les 26, 27, 30 janvier, 1er février).

Vendredi 5, nous allons voir Streb d’Elizabeth Streb au Chatelet. Je m’en souviens encore assez bien alors que je n’ai jamais rien vu d’autre de cette chorégraphe. Le dispositif mettait en jeu des actions plus proches de la gymnastique que de la danse, dans une sorte de boite dont les parois avaient été équipées de capteurs sonores. Les corps ne cessaient de percuter violemment ces murs et la force de l’impact était amplifiée par le son.

Samedi 6, avant-première émouvante de Petit frère avec l’équipe du film et les familles des jeunes acteurs et actrices des Courtillières.

Lundi 8, je note « fin lecture « Les Iks » de Colin Turnbull. Ce récit ethnographique sous-titré « Survivre par la cruauté » est glaçant : une petite communauté affamée par la transformation de leur terrain de chasse en parc national (nord-est de l’Ouganda) est devenue monstrueusement méchante et égoïste. Je me souviens d’une scène de vol de nourriture dans la bouche même d’un vieillard mourant.

Mardi 9, petit tour à la Fnac, la playlist du moment est Stina Nordenstam, Bonnie Prince Billy, PJ Harvey et Yann Tiersen. Le soir, concert des Joueurs de biques. Je ne me souvenais pas les avoir vu si souvent !

Lundi 15 février, Serge démissionne du comité Jeune Peinture. C’est très tendu. Katerine veut passer la main à la présidence de l’association qu’elle porte à bout de bras depuis très longtemps. Trop longtemps.

Le soir, le magistral Sombre de Philippe Grandrieux, un film entièrement sous-exposé. Je n’avais jamais vu le Tour de France ainsi. Je dessine Emma énervée, c’est rare que je mentionne cela mais nous avions dû nous engueuler ce soir-là.

Jeudi 8 octobre, je dessine ce qui ressemble à une bagarre dans ma classe de 4e, vendredi je note « baston » en sortant du collège à Drancy. Je m'en souviens parce que j'avais dû m'interposer entre un automobiliste agressif et un de mes élèves.

Mardi 13, concert mémorable de Vic Chesnutt dont j'avais pu apprécier déjà l'acidité désespérée mais qui ici, accompagné de Lambchop, nous plongea dans un délice de mélopée dépressive et tendue. Vic Chesnutt se suicidera 10 ans plus tard, un 25 décembre.

Vendredi 16 je me souviens avoir détesté ce spectacle de Bianca Li au néoclassicisme ironique mais finalement juste pénible.

Samedi 17, je n'ai aucun souvenir de cette fête chez Serge A... ou aux Cannibales ? Ou les deux ? Je ne comprends pas. Serge est un artiste qui était membre du comité d'organisation de Jeune Peinture. Je ne l'ai pas revu depuis cette époque, enfin pas sous ce pseudo puisque j'ai découvert son vrai nom quand il a présenté le lycée où ma fille faisait sa rentrée. C'était son prof d'art, mais nous ne nous sommes pas croisés et je ne sais pas s'il m'a reconnu parmi la meute de parents.

Dimanche 18, il semble que l'épisode d'Urgence diffusé ce soir-là était nul. Avis d'experts.

Vendredi 23 octobre, vernissage de l'expo « Propos Mobiles » dans un garage Peugeot. Je griffonne le camion/showroom «Vivons Remboursés » de Mathieu Laurette. Le lendemain nous sommes très nombreux aux Metallos, mais pour y voir quoi ? Nous continuons en face, au Cannibale, puis dans une boite afro (la boite clandestine de la rue Sainte-Marthe?).

Lundi 26, la mère d'Emma part travailler à Mayotte.

Mardi 27, beau concert de 22 Pistepirkko à la Guinguette Pirate. Je crois que me souvenir avoir croisé JC Menu.

Mercredi 28, je note « démission Irène ». Je ne sais plus qui est cette Irène mais je me souviens que l'ambiance était tendue à cette période à Jeune Peinture.

Jeudi 29 (les « jeudis de l'Asso »), nous écoutons Aliocha jouer du bango dans le local de l'Association. Aliocha (Elexei) est un violoniste russe, un ami de Guillaume.

Les semaines sont très remplies par 3 activités qui laissent peu de place à autre chose : la fin de la thèse, les cours au collège et la sélection des artistes pour l’expo Jeune Peinture.

Mardi 10 novembre, fête chez Guillaume pour le départ de Christophe au Mexique. Quelqu’un se coince la main dans la porte et personne ne s’en rend compte. Mais qui ?

Mardi 17, mort de Jacques Médecin (maire de Nice crapuleux), 1 an d’inéligibilité pour le père Le Pen et Emma a son code : champagne !

Samedi 21, travail de fou : découper toutes les illustrations de ma thèse et les coller à la bombe une par une dans les 8 exemplaires du mémoire (si je compte bien ceux qui sont sur le bureau dans le dessin). Assisté par Emma !

Dimanche 22, Lola nous rend visite avec quelques enfants (de la même famille si je me souviens bien) des Courtillières (Pantin) acteur.ices du film Petit Frère.

Samedi 28, voilà, la thèse est imprimée !

Dimanche 29 novembre, concert de Cat Power au Café de la Danse. Autant le précédent était une merveille de grâce tendue et délicate, autant celui-ci est un concentré de malaise. Chan Marshall va mal et ça se voit, elle interrompt presque tous ses morceaux, jure, recommence, laisse ses musiciens seuls de longs moments… Sortir vite.

Lundi 30 novembre, le Consortium (Dijon) s’expose à Pompidou et je dessine le studio de musique de Rikrit Tiravanija.

Le lendemain nous allons au Studio de la danse mais je ne marque pas de quel.le chorégraphe il s’agit.

Mercredi 2 décembre, la réunion Jeune peinture chez Elvire est agitée. Je reconnais Catherine à gauche, Jean-Pierre à droite, mais celui ou celle du milieu ?

Jeudi 3 décembre, nous allons aider pour un grand mailing adressé aux amis de l’Association.

Vendredi 4 décembre, Nelson Goodman est mort!

Dimanche 6, notre terrain habituel à Cachan est occupé alors nous allons sur un autre plus haut vers l’aqueduc  : je m’en souviens très bien car c’est la première fois que je joue sur un terrain synthétique et que trouve ça horrible!

Lundi 7 décembre, tiens, Emma C est née :)

La thèse terminée, je peux retourner plus sérieusement au cinéma. 3 films cette semaine dont le grand Les fleurs de Shanghaï de l’inégalable Hou Hsiao Hsien. Le deux autres films sont sortis de ma mémoire…

Mercredi 9 décembre, Iznogoud veut être calife à la place du calife (sous les traits d’Acidenitrix). Un puputsch a dit l’autre.

Ce même jour j’interviewe longuement Daniel Buren avec Nicole P, au café Beaubourg. A l’occasion des 50 ans de Jeune Peinture (créée en 1949) nous avions décidé d’inclure dans le prochain catalogue 1999 des témoignages d’artistes qui ont marqué son histoire. Le groupe BMPT a été créé à l’occasion du salon Jeune Peinture par une performance qui est restée dans l’histoire (1966). Daniel Buren a été très amical et très intéressant aussi. La transcription de l’entretien me prendra pas mal de temps dans les jours qui suivent.

Samedi 12 décembre, Lola avait filmé une de mes installations sur cassette Umatic et je vais chez son père, Jacques, pour tenter de faire un montage. C’est un échec mais je suis impressionné par la grosse « BMW à Jacques ». 

Lundi 14, Christine soutien sa thèse et je ne me souvenais plus du tout que le pot avait eu lieu chez Cécile D. Pierre semble tout chamboulé. 

Mercredi 16 décembre, l’artiste Jacques Monory vient voir mon travail pour écrire un article. Alors pour l’occasion je transforme le salon en show-room. Monory est extrêmement sympathique et Emma reste sous le charme. 

25 décembre, je dessine la cuisine de mes parents depuis le canapé du salon. J’ai l’impression que rien n’a changé depuis… 25 ans.

Mardi 29 décembre, quelques semaines après son accouchement, Dominique a oublié qu’elle n’avait plus d’abdominaux… elle termine la piste en scooter des neiges, la classe.

Samedi 9 janvier 1999, nous emménageons rue des Couronnes, dans l’immeuble où nous habitons encore aujourd’hui.

Lundi 11 janvier, premier croquis de notre appartement.

Samedi 16, Ben est avec son pote Guillaume à Noirmoutier. Guillaume est venu lui confier son pittbull Shy pour quelques semaines, un gros molosse très costaud qui passe son temps sur les genoux de son maître et ne supporte pas de rester seul. Il mangera la porte de la chambre.

Samedi 23 janvier, soutenance de thèse, enfin ! Le jury est 100% masculin, à l’ancienne.

Les mots en rouge sur cette page ont été ajoutés plus tardivement, à l’occasion d’une visite d’exposition où des tampons étaient en libre accès mais je ne souviens plus où ni quand.

Dominique B, en regardant cette page d’agenda, m’avait demandé pourquoi je dessine un truc aussi banal que prendre un bain. Je lui avais répondu que je ne prenais jamais de bain donc que ce n’était pas si banal. Et je crois justement me souvenir de ce bain du dimanche 24, en retour de soutenance de thèse. Repos.

Vendredi 16 juillet, je note « Telecom installent la ligne Jeune création ». C’est donc que nous avons déjà décidé du nouveau nom de Jeune Peinture, mais c’est drôle, je n’ai pas marqué quand la décision a été prise.

Samedi, je suis témoin de mariage d’Olivier et Manue et je fais un petit croquis de leur maison dans les vignes, à Vacqueras. Je rentre dimanche soir pour la première réunion « Jeune création ».

Mercredi 21, arrivée à Antananarivo. Rien dans ce que je note et dessine n’informe sur notre première impression : la dureté et la tristesse de cette ville d’une pauvreté spectaculaire. Les seules voitures neuves que nous voyons sont les gros 4x4 blanc de l’ONU. Le taxi que nous prenons à l’aéroport est une 4L hors d’âge au sol troué. Le chauffeur nous demande de payer la course à l’avance pour s’arrêter ajouter quelques litres d’essence dans son réservoir.

Nous avons changé nos plans : nous partons dès le samedi pour Mayotte et nous reviendrons à Madagascar en deuxième partie de voyage. A peine arrivés, nous sommes invités chez Romouli, un ami de Marie-Claude, sur la plage de Boueni, pour un voulé de mabawa (c’est-à-dire un barbecue d’ailes de poulet, achetées congelées dans de grandes caisses en polystyrène). Un délice.

Je dessine le grand baobab de Musicale plage mercredi 28.

Samedi 31, retour à Madagascar. En cet été 1999, une épidémie de choléra s’est développée sur l’île alors à notre descente de l’avion, nous devons avaler un gros cachet (?)… que nous vomissons dès notre arrivée à l’hôtel. Lorsque le cas se représentera, nous ferons semblant de l’avaler, comme tout le monde.

Mardi 3 août, nous partons en randonnée vers les villages Zafimaniry avec Freddy, un guide que mes cousin.es avaient rencontré le mois précédent. En route, Freddy achète un poulet qu’il tue et cuisine dans la foulée. Nous le dégustons avec un redoutable rhum artisanal (65°). Je fais un assez long croquis (pas celui sur l’agenda, un autre) et tous les enfants du village se rassemblent derrière moi. Je me souviens qu’ils avaient tous plus ou moins la morve au nez (il fait froid sur les plateaux). Certains sautent de rocher en rocher sur des échasses. Je ne sais plus comment c’est arrivé mais Emma propose de les faire chanter, sans doute aussi pour me permettre de finir mon dessin plus tranquillement.

Mercredi 24 mars, l’OTAN intervient dans la guerre du Kosovo en bombardant la Serbie, dans ce qu’elle nomme une « guerre humanitaire ».

Jeudi 25 mars, 5e saison de Friends chez les filles, c’est du sérieux.

Samedi 27, fête chez Sarah et Cécile. Une personne est particulièrement insistante pour demander le titre n° 11 d’un CD. Je ne reconnais pas qui ça peut être. Mais reloue.

Tiens, dimanche 29, Abdallah vend déjà ses bijoux chez Christophe ! Et le soir, pho chez Dong Huong puis bière au Cannibale, un dimanche normal quoi.

Lundi 29, seconde avant-première de Petit frère de Jacques Doillon.

Dimanche 4, je me prends un ballon dans la tête et un copain de Nicolas se fait poignarder à la gorge par un camé. Trop de violence.

Lundi 5 avril, montage de l’expo Jeune Peinture dans l’Espace Eiffel Branly (une halle sous chapiteau construite à l’emplacement de l’actuel Musée Branly pour accueillir des foires et salons pendant les travaux du Grand Palais).

Mercredi 7, nous avions un jury « d’historiques » du salon pour ce 50e anniversaire : Ernest Pignon Ernest, Jan Voss, Michèle Katz (la seule femme), Jean-Paul Albinet, Jacques Monory et Régis Durand (tous les 3 décédés aujourd’hui).

Le lendemain, première inspection dans ma classe de collège et hop, je file au vernissage. Je ne me souvenais pas que les jeunes acteur-ices de Petit frère étaient venu.es ! Nous terminons la soirée avec elles et eux dans une pizzeria des Champs Élysées.

Bastien expose de grands dessins au fusain cette année-là, mais il ne peut pas rester pour le vernissage car son père ne va vraiment pas bien. Il arrivera trop tard. La chanson Auxerre de son premier album raconte ce triste voyage « dans ce train qui se presse ».

Mercredi 14, super concert de Calexico et Dominique A à la Cigale.

Dimanche 18, fin de l’exposition, j’avais oublié que mon installation en sucre avait été cassée. Elle n’était pas terrible cette installation…

Lundi 16 juin, une semaine qui commence mal : j’ai mis du super dans la vieille diesel de Nicolas. Pffff. J’ai emprunté cette voiture pour aller visiter un local à Pantin : nous avons d’urgence besoin d’un nouveau QG pour l’association Jeune Peinture (la cave de la rue des Immeubles Industrielles doit être rendue à son propriétaire et nous devons communiquer une adresse pour recevoir le millier de dossiers de candidatures pour la prochaine expo).

Vendredi 18, le spectacle I said I d’Anna Teresa de Keersmaeker déclenche une bagarre dans le public du Théâtre de la Ville !! Je n’en ai pas beaucoup de souvenirs mais d’après le petit dessin, c’est dans cette pièce que les danseur.euses viennent rapidement déposer des objets en front de scène créant une sorte d’installation éphémère que j’avais trouvée assez magique.

Samedi 19, je note « la voisine fait chier » mais je dois lui rendre justice (elle est décédée depuis) : nous abusions vraiment.

Dimanche 20, on dirait que je marque un but. Mytho.

Lundi 21 juin, fête de la musique arrosée et de proximité entre rue St Maur et rue JP Timbaud (Les couleurs, le Cannibale, le café bleu).

Mercredi 23, envoutante exposition monographique de la grande Pipilotti Rist au Musée d’Art Moderne. Je suis particulièrement fasciné par le salon qui cache des vidéoprojections sur des meubles et objets (je me souviens d’une petite vidéo de football projetée sur l’arrière d’une bouteille de whisky).

Jeudi 24, après mes cours, nous allons écouter Henri Texier et Zakir Hussein/John Mc Laughlin à la Villette. Le jazz a tendance à me fatiguer mais en concert quand même, c’est bien autre chose.

Vendredi 25, nous commençons à réfléchir à un changement de nom de Jeune Peinture (parce que nous en avons marre de devoir toujours corriger « qui n’expose pas que de la peinture »). Je note « C.I.J.A » qui semble avoir été un nom envisagé… Collectif International de Jeunes Artistes ?? C’est très moche.

Samedi 26, le dessin de la fête chez la sœur de Marion ne réveille aucune souvenir. C’est quoi ce bonhomme poilu à moitié nu ??

Tiens dimanche Emma dessine !

Samedi 3 juillet, crémaillère de Nat et Sylvain, quelqu’un (Franck C ?) avait noué toutes les chaussures entre elles pour une longue guirlande trimbalée sur la terrasse / piste de danse. Trop facile à dénouer le lendemain au réveil.

Semaine du 5 juillet. C’est la deuxième disparition d’un proche qui apparait dans ces carnets. Il y eu le suicide de Pierre S. Et maintenant le décès d’un autre Pierre, le père d’Emma. Je vois qu’à chaque fois, le dessin se fait plus rare. Ici je ne dessine presque que des repas… je trouve ça vraiment ridicule avec le recul, déplacé même. Dimanche, nous allons faire des courses avec Emma, Camille et Chloé, une petite parenthèse où nous tentons de retrouver un peu de légèreté enfantine en jouant avec le caddie. Ça, je pouvais (mal) le dessiner.

Mercredi 11 août, nous partons en pirogue à Anakao, un village de pécheur sans électricité où nous restons 5 jours, à regarder la mer. Emile, notre logeur qui tient une petite épicerie, est le seul du village à posséder un groupe électrogène, ce qui lui permet d’avoir un petit téléviseur noir et blanc, sur lequel nous assistons en direct à l’éclipse totale du soleil en France. Devant cette même télévision, le village se rassemble chaque soir pour voir Marimar, telenovela mexicaine qui passionne ici, moyennant une petite pièce. Le lendemain midi, pour la rediffusion de l’épisode de la veille, la séance est gratuite.

Samedi 14, nous passons la barrière de corail pour essayer de voir des baleines, et nous n’en menons pas large face au mur d’eau sur lequel notre barque à flotteur peine à se hisser. Par chance, nous voyons une baleine et son baleineau, qui, encore maladroit, remonte sur notre flotteur risquant d’exploser l’embarcation.

Nous assistons aussi ce jour-là au retour au village d’un vieux Français. Il était resté à Toulouse plusieurs mois pour se faire opérer et le village entier fête le retour de Dadabe (« grand-père »), en tirant une chèvre qui sera mangée le soir en son honneur. Le lendemain, Dadabe nous invite à prendre l’apéro chez lui. En 2 heures, cet ancien pilote de ligne assez monstrueux, qui se vante d’avoir couché avec la plupart des jeunes filles du village, nous dresse un portrait sombre d’Anakao où il habite depuis plus de 10 ans. Village pourri par l’argent du tourisme (quel tourisme ??), pêcheurs qui ne pêchent plus, faux amis qui ne lui parlent que pour lui soutirer de l’argent et louent sa maison en son absence, jalousie, prostitution… Les récits du peu sympathique capitaine font du village une sorte de concentrée de perversion post-coloniale, là où nous avions eu l’impression d’avoir vécu dans un havre de douceur de vivre. La vérité est sans doute entre les deux et si nous n’avons pas avalé tous les propos aigris du vieux blanc, nous avons aussi dû admettre notre naïveté qui nous arrangeait bien.

Soir du mardi 17, je termine Bruit de fond de Don Delilo. Marquant.

Jeudi 19 août, retour en France, je trouve dans la boîte aux lettres ma nomination comme enseignant titulaire dans un collège d’Epinay-sur-Seine. Et comme je n’ai pas eu confirmation de mon détachement à la fac d’Amiens, je m’inquiète…

Mardi 24, je retourne chez Valérie, dans notre ancien appart, pour une journée de tirage photo dans sa salle de bain/labo.

Mercredi 25 : ouf, Amiens confirme.

Samedi 29, grosse fête d’anniversaire de Dominique et Christine à Corleone (alias St Marcel-bel-Accueil). Joël tombe et Eric se fait martyriser par les enfants de la familia qui le poursuivent avec des tapettes à mouche. Normal quoi.

Dominique n’est pas contente parce que le frigo est cassé. Pas de souvenir de ça.

Mercredi 1er septembre : nous choisissons le nouveau logo de Jeune création.

Jeudi 2 septembre, je découvre les locaux de la Faculté des Arts d’Amiens, encore au Logis-du-Roy à cette époque-là. Puis nous retournons à Noirmoutier, première joie de ne plus enseigner en collège et d’échapper à la rentrée du début septembre.

Dernières pages de ce 8e agenda dont la couverture (qui a bien souffert) est recouverte de deux tirages de mes photos de Chine (été précédent).